Page 7 - Extrait de Juste un grain de sable de Sophie Jalabert
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Il y a ma vie d’avant et ma vie d’après, celle de maintenant.
Dans la première tout allait de soi. Pas de questionnement in-
utile ; tracé facile, limpide, malgré les inévitables microsco-
piques grains de sable du quotidien. Une route toute droite de
l’enfance choyée, aisée, à la quarantaine stable, épanouie. Un
mari attentionné, des enfants sans problème majeur, un appar-
tement cossu dans le XVIe arrondissement, des amitiés souvent
teintées d’élégante mondanité. Alain m’aimait, j’aimais Alain,
et nous élevions posément Marie et Louis. Dans la ville agitée,
je m’agitais avec légèreté, à l’unisson.

Le monde tournait, pas toujours rond, pas toujours rassu-
rant, mais il tournait. Nous en percevions les circonvolutions
à travers les fluctuations de nos activités respectives, à l’occa-
sion de discussions parfois virulentes au sein de notre cercle
de relations. Effleurés, jamais directement touchés, nous ob-
servions à bonne distance le cours des événements, le flux et
le reflux des opinions, des gouvernements, la valse des puis-
sants, les drames des impuissants.

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