Page 8 - Extrait de Champ d'artichauts de Sophie Jalabert
P. 8
lui faire une scène, après tout, avec qui avait-il l’intention
d’y vivre, Nina ou elle ? Elle reste convaincue qu’il lui avait
fait visiter en cachette avant de signer le bail. C’est bien son
genre, ne vouloir contrarier personne tout en n’en faisant qu’à
sa tête.
Les minutes passent, Marc ne remonte pas. Manon ne
chantonne plus. Sa bonne humeur a été scalpée par le claque-
ment de la porte. Le dîner refroidit. Elle regarde sa montre,
une demi-heure pour aller ouvrir la porte, trop long. Où est-il
passé ? Si l’ascenseur était bloqué entre deux étages ? Cela ar-
rive de temps en temps. Non, il l’aurait appelée. Manon s’in-
quiète, cherche une explication plus ou moins rationnelle.
Elle guette ses pas sur le palier, tend l’oreille pour vérifier si
l’ascenseur fonctionne. Elle en perçoit les grincements dans
le silence vespéral. Par ailleurs, Marc descend toujours à pied.
S’il était tombé, s’il était inconscient, blessé ? Elle prend ses
clefs, dévale les marches, pousse jusqu’au garage. Pas de
Marc. Plus de voiture. Elle panique. Il est arrivé quelque
chose, elle en est certaine. Il n’a pas pu s’en aller juste comme
ça, au moment où elle s’apprêtait à rogner ses résistances jus-
qu’à la moelle, à le faire capituler par tous les artifices du
charme, à avoir recours au chantage affectif si nécessaire, ce
moment où ils allaient enfin concevoir leur enfant !
Elle remonte en courant, attrape son portable, va l’appeler.
Elle hésite. Elle déteste faire ça, elle a toujours l’impression
de le fliquer, de l’envahir. Elle hésite à nouveau, affiche son
numéro, fait les cent pas entre l’entrée, pour écouter encore,
et le salon, remet le portable en veille, le rallume, affiche à
nouveau le contact. Malgré la culpabilité rampante et puisque
c’est une urgence, elle s’octroie le droit de savoir. Il est peut-
être quelque part en danger, elle doit lui venir en aide, elle
doit agir. Les scenarii les plus fous lui traversent l’esprit, elle
le voit gisant dans un bain de sang à la suite d’un accident,
11
d’y vivre, Nina ou elle ? Elle reste convaincue qu’il lui avait
fait visiter en cachette avant de signer le bail. C’est bien son
genre, ne vouloir contrarier personne tout en n’en faisant qu’à
sa tête.
Les minutes passent, Marc ne remonte pas. Manon ne
chantonne plus. Sa bonne humeur a été scalpée par le claque-
ment de la porte. Le dîner refroidit. Elle regarde sa montre,
une demi-heure pour aller ouvrir la porte, trop long. Où est-il
passé ? Si l’ascenseur était bloqué entre deux étages ? Cela ar-
rive de temps en temps. Non, il l’aurait appelée. Manon s’in-
quiète, cherche une explication plus ou moins rationnelle.
Elle guette ses pas sur le palier, tend l’oreille pour vérifier si
l’ascenseur fonctionne. Elle en perçoit les grincements dans
le silence vespéral. Par ailleurs, Marc descend toujours à pied.
S’il était tombé, s’il était inconscient, blessé ? Elle prend ses
clefs, dévale les marches, pousse jusqu’au garage. Pas de
Marc. Plus de voiture. Elle panique. Il est arrivé quelque
chose, elle en est certaine. Il n’a pas pu s’en aller juste comme
ça, au moment où elle s’apprêtait à rogner ses résistances jus-
qu’à la moelle, à le faire capituler par tous les artifices du
charme, à avoir recours au chantage affectif si nécessaire, ce
moment où ils allaient enfin concevoir leur enfant !
Elle remonte en courant, attrape son portable, va l’appeler.
Elle hésite. Elle déteste faire ça, elle a toujours l’impression
de le fliquer, de l’envahir. Elle hésite à nouveau, affiche son
numéro, fait les cent pas entre l’entrée, pour écouter encore,
et le salon, remet le portable en veille, le rallume, affiche à
nouveau le contact. Malgré la culpabilité rampante et puisque
c’est une urgence, elle s’octroie le droit de savoir. Il est peut-
être quelque part en danger, elle doit lui venir en aide, elle
doit agir. Les scenarii les plus fous lui traversent l’esprit, elle
le voit gisant dans un bain de sang à la suite d’un accident,
11
